Catégories
actualités

Interview de Nina Menkes

Une réalisatrice engagée

Nina Menkes est une réalisatrice qui est née à Jérusalem et a grandi en Californie. Elle enseigne au California Institute of the Arts à Santa Clarita. Nous avons découvert son travail grâce à son film documentaire Brainwashed: Sex-Camera-Power disponible sur Arte.

Elle nous fait l’honneur de nous parler des femmes sur l’écran et derrière la caméra ainsi que du langage visuel de l’oppression souvent résumé par l’expression male gaze.

Le male gaze

Comment vivent les réalisatrices à Hollywood ? C’est quoi le male gaze ? Vous voulez des exemples précis et enfin comprendre c’est quoi le problème avec le male gaze ? Peut-on filmer des scènes de sexe sans male gaze ? Pour répondre à ces questions, écoutez notre interview de Nina Menkes, la réalisatrice de Brainwashed: Sex-Camera-Power.

. .
Le documentaire de Nina Menkes est disponible en DVD.

Nina nous a épatées par ses réponses claires et sincères ainsi que ses exemples pertinents. Ses arguments sur le male gaze au cinéma nous ont rappelé les nôtres sur les points de vue confisqués en littérature dans Pour en finir avec la passion.

. .
nina menkes by ondrea barbe smile love

Pour aller plus loin

https://www.arte.tv/fr/videos/110260-000-A/brainwashed-le-sexisme-au-cinema/

https://www.champselyseesfilmfestival.com/2023/en/avant-premieres/movie-604-brainwashed-sex-camera-power

https://www.berlinale.de/de/2022/programm/202200805.html

Laura MULVEY, « Plaisir visuel et cinéma narratif » dans Au-delà du plaisir visuel, éd. Mimésis 2017 [1975].

Films cités en exemple dans l’interview par Nina Menkes :  Lost in translation de Sofia Coppola (2003), Magdalena Viraga de Nina Menkes (1986), Saint Omer d’Alice Diop (2022), Sans toit ni loi d’Agnès Varda (1985), Titane de Julia Ducourneau (2021)

Transcription et traduction

L’interview est en anglais: la traduction et la transcription sont disponibles ci-dessous. Erratum : Nina Menkes est née à Jérusalem.

Catégories
actualités

Interview – Manuel Alduy (Francetv) : Cannes et #MeToo

Alors que se tient le festival, la presse française titre beaucoup sur #MeToo, avec un focus particulier sur Judith Godrèche. La projection de son court-métrage Moi aussi a fait événement, comme la montée des marches de son équipe le 15 mai ; le geste symbolique de se couvrir la bouche relayée depuis sur les réseaux sociaux semble symbolique d’une montée impuissante de ce sujet dans le milieu du cinéma.

Au même moment, le monde fait sa une sur le #MeToo français, une polémique naît autour de l’idée d’une feuille de route de lutte contre les VSS de Vincent Lindon, à laquelle s’ajoute la rumeur d’une liste de noms d’agresseurs qui circuleraient on ne sait pas trop.

Bref, de l’extérieur, Me Too semble le sujet cannois…

Or, le festival est surtout un gigantesque salon professionnel permettant les rendez-vous, signatures de contrats et la naissance de nouveaux projets.

Qu’en est-il vraiment ?
Pour y répondre, nous recevons aujourd’hui Manuel Alduy, directeur du cinéma et de la fiction chez France Télévisions et nous l’interviewons à Cannes pour le 77e Festival du film.

. .

Manuel Alduy, vous êtes au festival depuis son ouverture mardi. Le sujet #MeToo a-t-il été présent dans vos discussions professionnelles avec vos partenaires ? Et est-ce qu’il y a un discours différent sur le sujet selon que vous échangez avec des femmes ou avec des hommes ?

Bonjour, merci pour la quasi triple question. En fait, le festival de Cannes, c’est pour l’industrie du cinéma et tous les partenaires, notamment les diffuseurs comme France Télévisions ou d’autres, le moment le plus important de l’année parce que c’est le festival de cinéma le plus important du monde en termes de couverture médiatique, en termes d’importance économique pour le secteur.

Et donc, en soi, toutes les tensions, tous les sujets que la filière peut traiter le reste de l’année, à Cannes, prennent une ampleur un peu plus exagérée, un peu plus aiguë. #MeToo a quand même été un sujet pour le cinéma français sur les derniers mois écoulés. Il y a eu une secousse avec les révélations de Mediapart sur le cas de Gérard Depardieu il y a un an, en mars 2023. Ensuite, un complément d’enquête sur Depardieu, puis, début février, Judith Godrèche qui a relancé le sujet. Et ensuite, le #MeToo garçon. Donc, en fait, il était inévitable d’avoir #MeToo dans les conversations. Ce n’est pas le seul sujet, mais c’est impossible et ça aurait été désastreux que #MeToo ne soit pas quelque part dans les conversations.

Deuxièmement, je pense que, pour des raisons de manipulation contre #MeToo, des gens anonymes sur les réseaux sociaux, Twitter pour ne pas le nommer, ont voulu laisser penser, 15 jours avant, qu’il y avait une liste, une espèce de traque, à dix noms, par des journaux d’enquête comme Mediapart. Et ça, ça a remis une pièce dans le jukebox des conversations professionnelles. Mais collectivement, on sait que cette liste n’était pas là pour dire #MeToo avance mais que #MeToo était une affaire de corbeau, de délation anonyme, puisque sur ces sujets, vous avez deux façons de voir le sujet. Soit vous le prenez du côté des accusés, soit vous le prenez du côté des victimes. Avoir une liste de victimes qui témoignent : « j’ai été abusé, voilà mon histoire », ça c’est une chose. Dire « on n’a rien à vous donner en terme de preuve, un tel et un tel est coupable », c’est une autre démarche. C’est de la diffamation et ça dessert en fait le sujet. Depuis, ça a été très bien expliqué par des journaux, Mediapart a dit qu’ils ne travaillaient  pas sur une liste – ils travaillent sur des cas, mais ils ne travaillent pas sur une liste. Ce sujet de la liste est arrivé un petit peu avant le festival, avant qu’on n’arrive à Cannes. C’est vrai que dans les 48 premières heures du festival, c’était encore un peu dans les têtes de certains et de certaines. Comment il aurait fallu gérer cette liste ? Est-ce qu’on aurait dû demander aux journaux qui étaient nommés de réagir plus vite ?

Enfin, c’est un autre débat, mais oui, on en a un peu parlé. Comme la parole entraîne la parole, plus de cas d’abus dans le cinéma ont été révélés ces derniers mois, tout le monde est arrivé à Cannes en se disant « et si jamais, pendant Cannes, un film est abimé par la révélation qu’un de ses talents est accusé de violences sexuelles ? ». Après, chacun s’y prépare comme il l’entend. Nous, on a une façon de gérer qui est un peu désynchronisée par rapport à un festival. Chez nous, sur la télévision, on ne censurera jamais les films. On ne va pas diffuser un film dans le chaud de l’affaire, sinon on pourrait dire qu’on est indifférent. Et troisièmement, si les cas d’accusation sont nombreux, et pas forcément tous répréhensibles, on n’aura plus envie de célébrer, en tant que soirée spéciale ou thématique, la personne incriminée. Ça n’a rien à voir avec la question de présomption d’innocence.

Ce n’est pas agréable d’avoir à penser à ça, mais je pense que le cinéma a besoin d’être exemplaire, et donc, il faut aider à ce que la parole soit écoutée. La vraie différence entre  aujourd’hui et il y a longtemps, il y a cinq ans, il y a dix ans, il y a quinze ans, c’est qu’il y a toujours eu des cas choquants. Simplement, aujourd’hui, davantage de personnes pensent qu’elles peuvent dire qu’elles étaient choquées sans risquer des représailles.

France Télé soutient la lutte contre les VSS (renommée récemment VHSS, pour violence et harcèlement sexuel et sexiste), notamment par la diffusion du court-métrage de Judith Godrèche, Moi aussi. Il y aura une diffusion d’abord dans C ce soir, le 23 mai, et ensuite sur Culture Box, le 25 mai. Quelle a été la genèse de votre soutien à ce projet et en quoi est-ce qu’il rejoint le line-up ou les engagements de France Télévisions ?

France Télévisions a eu cette démarche, depuis longtemps grâce à notre présidente Delphine Ernotte en 2015, d’amener davantage de parité dans la fabrique de images, c’est-à-dire les personnes qui réalisent ces fictions. Il y a depuis longtemps un quota de réalisatrices sur les fictions télé. Le nombre d’expertes et d’experts sur les plateaux et les émissions est arrivé à la majorité sur l’ensemble des magazines. On pense que davantage de parité dans le cinéma, devant et derrière l’écran, ça va aider ce sujet, la prévention des violences sexuelles dans la fabrique du cinéma. Donc ça, c’est le cadre général.

Pour le long-métrage, on a suivi le sujet sur les violences conjugales avec Jusqu’à la Garde, diffusé en France Télévisions  Il y a eu aussi Les chatouilles d’Andréa Bescond. Donc on est dans un sujet qui est à la fois un sujet éditorial et politique.

Quand Judith Godrèche est venue nous présenter son envie de faire un film, un court-métrage, avec un dispositif, qui n’est de tourner en une seule journée, avec le plus de victimes dans l’installation, on s’est dit, oui, il faut qu’on en soit. Je me souviens, lors du premier rendez-vous, qui était le jour des Césars, on a confirmé qu’on pré-achèterait ce film. L’objectif était qu’il soit prêt pour le Festival de Cannes, et qu’il serve à poursuivre la prise de conscience générale.

Ce qui est très fort dans le film Judith Godrèche – ce n’est pas la première fois que ça arrive dans le cinéma – c’est que quand on montre les victimes, les vraies personnes, ça a une valeur, je pense, documentaire et émotive énorme. Et c’est ça qui est bien dans ce film.

Par ailleurs, on est partenaire du Festival de Cannes, on cherche toujours à avoir des choses à montrer qui soient en lien avec ce festival parce que nous voulons faire vivre le festival à tous en France à travers nos émissions. En fait, il y avait vraiment des arguments éditoriaux, politiques et stratégiques évidents pour nous pour accompagner ce projet.

Le CNC, de son côté, a organisé une rencontre sur les VHSS, malheureusement, seulement accessible sur invitation. Le même CNC conditionne désormais l’éligibilité de ces aides à la formation des sociétés de production à la lutte contre les VHSS. Cette formation va s’étendre à partir de juillet 2024 à toute l’équipe d’un tournage pour chaque tournage. Que pensez-vous de cette décision et de manière générale la politique du CNC sur les VHSS ?

Le CNC a bien agi. Je me souviens qu’il y a deux ans, quand les premières formations obligatoires sont arrivées, certains producteurs considéraient que c’était un peu gonflé, inutile.

En tant que salarié administratif de France TV, on a tous fait une formation sur la violence et le harcèlement sexuel en entreprise. On se surprend toujours à apprendre des choses.

Donc, je pense que le CNC a bien travaillé dans un secteur qui a un mode de fonctionnement que le grand public commence à comprendre, qui est compliqué. Pourquoi ? Parce qu’on n’est pas dans une industrie qui travaille avec des salariés qui viennent le matin au bureau et qui s’en vont le soit. A un moment, un film, c’est juste un scénariste. Après, il y a le moment de casting, on est forcément plus nombreux. Ensuite, il y a un moment de production, de tournage. Là, il y a beaucoup de monde. Parfois, il y a des gens qui se voient aussi le soir. Le tournage ne se Passe pas dans leur ville. Comment on régule ces moments ? Après, il peut y avoir des soirées de fin de tournage,  des moments post-tournage à gérer.  La prévention des violences sexistes et sexuelles sur un lieu de travail, dans un cadre d’entreprise normal, on voit à peu près comment ça doit se passer. Il y a des représentations personnelles, il y a des process, il y a des formations. C’est déjà en gros un gros sujet. Mais sur la production artistique d’un film qui est un processus technique beaucoup plus diffus, ça pose des vraies questions. 

J’ai entendu des productrices et des producteurs me dire, par exemple, ne pas voir l’intérêt de passer une demi-journée à leur expliquer ce qu’il faut faire et ne pas faire sur ce sujet des VHSS. On s’est quand même tous rendu compte que plus on en parle, mieux on arrive à prévenir les risques. Parce qu’on décourage les agressions potentielles. Mais ce n’est pas forcément simple ; il faut reconnaître que ce n’est pas facile. Il faut des formations supplémentaires.

Pour revenir à votre question, je pense que ce sont des bonnes actions qui prennent du temps. Il ne faut pas sous-estimer la particularité du cinéma, comme tout au sein du spectacle vivant, théâtre, concert, etc.

Dans son discours d’ouverture, Camille Cottin a dit que, je cite, « les rendez-vous professionnels nocturnes dans les chambres d’hôtels des messieurs tout-puissants ne font plus partie des us et quittons du vortex cannois ». Alors, question simple, est-ce vraiment le cas ? J’ajoute une observation pour ceux qui ne connaissent pas Cannes en temps de festival. Le dispositif du festival inclut des suites d’hôtels qui sont louées par des professionnels, diffuseurs, producteurs, pour organiser des rendez-vous, et où une grande partie de l’activité, y compris professionnelle, se fait la nuit, dans une atmosphère pratiquement de discothèque à ciel ouvert. Est-ce que tout cela n’est pas propice aux abus ? Et où en est-on vraiment dans les us et coutumes, pour reprendre le terme du vortex cannois ? 

Alors, en fait, il y a plusieurs Cannes. Par exemple, France Télévisions a créé un espace avec Brut, notre éco-partenaire du Festival, qui est un espace à ciel ouvert dans lequel on fait cet enregistrement. On passe notre journée là. C’est un espace qui nous est prêté par le Festival de Cannes. Vous pouvez témoigner, il n’y a pas de chambre. C’est un espèce d’immense hangar, d’une transparence technique totale. Donc, c’est notre façon de travailler. 

Ensuite, il y a effectivement beaucoup de producteurs, plutôt des distributeurs d’ailleurs, qui n’ont pas envie de louer des espaces de travail dans le palais du Festival, où se passe le marché des film. Ces espaces, ce sont des stands. C’est comme le salon du livre. Donc là aussi, c’est transparent. C’est là que les rendez-vous professionnels se font le plus souvent. 

Les suites sont réservées à des quelques sociétés parce qu’elles sont hors de prix ; il y a  aussi des appartements louées à des Cannois qui s’en vont.

Et cette année, le seul sujet qui peut demeurer, c’est que Cannes, c’est douze jours non-stop. Même la nuit. Les films, les projections sont en fin d’après-midi. Les équipes de films se retrouvent avec leurs partenaires vers 23h ou 22h. Vous ne croisez – la ville n’est pas grande – que des professionnels partout, tout le temps, le matin, le midi, le soir et la nuit. C’est vrai qu’il y a un vortex cannois, un petit côté usine. 

Ce qu’il se passe la nuit, franchement, j’en sais rien. Les yachts, c’est un peu un mythe, parce qu’il y a très peu de gens qui ont les moyens d’avoir un yacht. Soit au yacht est au port, mais franchement, yachts et suites, c’est un peu pour la mythologie. C’est un peu le Cannes d’avant.

Aujourd’hui, la filière est quand même un peu plus fauchée, on fait assez attention. Moi, je ne pense pas qu’on découvrira dans trois ans, cinq ans ou dix ans, des cas qui se seraient déroulés cette année. Par contre, on a besoin de parler de ce qui s’est passé il y a dix ans ou il y a vingt ans, à un autre moment, où Cannes était moins médiatisé, mais un peu moins.

Et le message général, c’est que j’espère que toutes les personnes désinhibées dans leur relation avec les femmes – parce qu’en général, c’est surtout les femmes que ces violences concernent – vont se tenir à carreau.

On l’espère, en tout cas… Quel est votre avis sur la sélection de cette année ? Et quels sont vos espoirs concernant la visibilité des femmes et de la diversité dans le futur palmarès ? Est-ce qu’on avance sur cette question aussi ? 

Alors oui, je pense qu’on avance beaucoup. Plusieurs éléments, par exemple, la cérémonie d’ouverture. La cérémonie d’ouverture était une cérémonie sans homme. Ça s’est très bien passé, personne ne s’est dit que c’était une espèce de militantisme, etc. Vous aviez un hommage d’une chanteuse à Greta Gerwig, une palme d’honneur à Meryl Streep donnée par Juliette Binoche. Pas un seul homme n’a eu besoin d’intervenir sur scène. Ça s’est très bien passé. Et le Festival des Cannes est ravi. Tous les échos qu’on a eu, des professionnels, du grand public, ont été très bonnes et montrent que la formule était gagnante. Donc on peut faire de la parité plus-plus, c’est-à-dire de temps en temps ne pas avoir d’homme du tout : ça va bien se passer, c’est pas grave ! 

Après sur la sélection, il y a des pays qui sont plus en avance. Par exemple, nous, à France Télé, on a 19 films soutenus qui sont dans différentes sélections retenus par le Festival de Cannes. Dedans, il y a la restauration du Napoléon d’Abel Gance de 1927, mais sur les 18 films inédits qui restent, il y en a 8 qui sont de réalisatrices. Donc on est presque à la parité. Notre logique c’est de s’imposer au moins 30% ; l’année dernière, c’était 35%, cette année, en 2024, ça sera 40% de films réalisés par des femmes sur un festival qui regarde non pas le sujet du quota, mais le sujet de la qualité des œuvres. Ça passe, ça se voit, les œuvres sont sélectionnées. C’est super. 

Après, le Festival de Cannes choisit des films du monde entier. Il y a les cinématographies japonaises, américaines, il y a besoin d’avoir des films avec du casting international, de cohabiter avec des films qui sont plus intimistes. Il y a énormément de paramètres, en fait, dans la gestion d’un festival comme Cannes, qui fait qu’on n’est pas encore à la parité, mais ça progresse. C’est pour ça que nous, à France Télé, on aimerait bien que les autres diffuseurs financent le cinéma, que ce soit les diffuseurs payants, Canal+, les plateformes, ou nos sponsors privés, qu’ils soient tous dans la même démarche de « fixons-nous des quotas ».

Les quotas ne sont pas forcément indispensables tout le temps, mais quand il n’y a pas de quotas, c’est-à-dire un objectif forcé, ça ne bouge, ça ne bougera pas. Et les quotas font grincer des dents. Et même de productrices : il y a beaucoup de productrices qui sont parfois agacées qu’on leur dise  : « on n’a pas fait assez de films réalisés par des femmes cette année, je suis désolé ». Elles répondent : « Alors vous avez le choix de voir des films de réalisatrices mauvais plutôt que des films de réalisateurs super bons ? ». En général, notre réponse, ma réponse, c’est que tant que les femmes ne font pas autant de navets que les hommes, on a de la marge. C’est juste pour renvoyer la balle. Quand la filière sera collectivement adaptée, on n’aura plus besoin de  poser de contraintes. 

Je me suis un peu éloigné de votre question, mais je pense qu’au global, ça progresse, même si ce n’est jamais suffisant. Il y a aussi des types de films qu’on choisit. Par exemple, une des difficultés des femmes réalisatrices aujourd’hui, c’est qu’elles sont sur des films qui ne sont pas des films de genre grand public. On leur confie plutôt des films intimistes, d’auteur. On les voit rarement aux commandes des films d’aventure, des comédies, des romances. Il y a des réalisatrices dans ce cas mais c’est assez rare : il y a eu Jeanne Du Barry l’année dernière, de Maïwenn Le Besco, qui a fait l’ouverture de Cannes. Audrey Diwan fait une adaptation d’Emmanuelle à la rentrée. Ce sont vraiment des exceptions dans le milieu. Donc les femmes réalisatrices en France sont emprisonnées, je ne pense pas par choix, mais parce qu’elle sont financées plus facilement dans certaines thématiques.  

C’est une logique qu’on retrouve dans beaucoup de secteurs culturels…

Je pense que ça va progresser, ça va bouger parce que les plateformes américaines n’ont pas ces tabous-là. On va être obligé de bouger. Et si on ne bouge pas, c’est une filière qui va être obsolétisée par rapport à la jeune génération. 

Vous êtes très actif sur les réseaux pour défendre la cause #MeToo. Vous êtes peut-être, d’un point de vue extérieur, un des rares à autant en parler et de manière aussi claire. Vous  sentez-vous un peu seul en tant qu’homme dans ces prises de parole ? Pouvez-vous être précurseur dans un mouvement masculin général de ralliement à #MeToo ? 

Je ne sais pas. J’essaie juste de profiter de l’espace que me donne ma position, qui n’a qu’un temps pour, je pense, contribuer à aider à un rééquilibrage sur les regards, une meilleure prévention des violences sur les tournages.. 

En fait, je pense que, depuis 2017 quand #MeToo est arrivé sur les réseaux sociaux, il s’est passé deux choses. Beaucoup d’hommes du secteur sont totalement convaincus mais se sentent à juste titre non légitimes pour en parler. Je pense qu’en effet il faut être prudent. 

Je préfère le moment d’aujourd’hui où on dit « il faut qu’il y ait plus d’hommes » qu’à un moment #MeToo où il n’y a que des hommes sur ces sujets. Oui, ce que je veux dire, c’est qu’on est à un moment où il faut bien montrer que c’est un sujet qui nous concerne tous, femmes comme hommes, parce que c’est un sujet qui crée des souffrances dans les familles, dans la société en général.

Il y a pas mal d’autres personnes qui réagissent. Il y a peut-être un effet de loupe, car ce sont très souvent des hommes qui résistent à #MeToo. Ou des gens de ma génération, c’est-à-dire largement au-dessus de 50 ans. 

Mais en fait, si on élargit un peu la société et qu’on voit au-delà, il y a quand même pas mal de garçons qui sont comme moi !

Pour écouter l’interview, suivez le lien :


Catégories
actualités

Interview – Catherine Missonier

Catherine Missonier a commencé à publier des livres jeunesse après avoir écrit quelques histoires pour ses propres enfants. Elle connaît le succès avec des histoires policières qui se passent dans des collèges et se consacre pendant près de vingt ans à l’écriture.

. .

Mais c’est pour un autre ouvrage, Une lignée de femmes, paru chez l’Harmattan en 2015 que nous la recevons aujourd’hui. Nous tenterons de répondre avec elle à la question posée en sous-titre : “Peut-on échapper à l’emprise de sa mère ?” 

Catégories
actualités

Interview – Fanny Joly, itinéraire d’une autrice jeunesse

Vous connaissez sans doute Sylvie Joly. Peut-être même connaissez-vous Eva Joly. Mais connaissez-vous Fanny Joly ? 

Fanny a 16 ans lorsque sa soeur Sylvie se lance dans le one-woman-show (qui ne s’appelait pas encore comme ça à l’époque). Elle en est une des pionnières. Et c’est avec sa petite soeur que Sylvie écrit ses premiers sketchs…

. .

Fanny Joly est dès lors lancée dans l’écriture et devient autrice jeunesse. A ce jour, elle a signé près de 500 ouvrages !

Découvrez l’itinéraire d’une autrice jeunesse pas comme les autres dans ce nouvel épisode !

Pour aller plus loin :

https://fannyjoly.com/

127 ALBUMS ET ROMANS EN STREAMING sur STORYPLAYR lien ci-dessous :  https://www.storyplayr.com/search/Fanny%20Joly

NOMBREUX AUDIOS LUS PAR L’AUTRICE / ABONNEMENT D’ESSAI GRATUIT 1 MOIS 

3 ans et +  

° GUDULE 12 albums papier POD me contacter, aussi en streaming Storyplayr avec lectures audio par moi. 

° OVERDOSE DE ROSE album papier SARBACANE

6 ans et +  

° CHATEAU FORT EN DANGER BD Casterman 

° CHATS TROP FORTS GALLIMARD  2 tomes 

° CUCU LA PRALINE GALLIMARD 12 titres + 2 CD lecture par l’autrice   

° ALLO 1313 ? SARBACANE reprise 18 épisodes BD « histori-comique » J’Aime Lire

° LES ENQUÊTES DE MIRETTE SARBACANE 10 albums dont 4 en poche 

° FOUS DE FOOT CASTERMAN poche

9 ANS ET +  

° MARION et COMPAGNIE GALLIMARD, 9 romans et + de 50 nouvelles dispos en  streaming sur Storyplayr

Catégories
actualités

Interview – Isabelle Rome

Nous recevons aujourd’hui Isabelle Rome. Magistrate, Isabelle Rome a récemment été nommée première Présidente de chambre à la cour d’appel de Versailles. On la connaît par ailleurs pour avoir été ministre chargée de l’égalité Femmes-Hommes, de la diversité et de l’égalité des chances de mai 2022 à juillet 2023.

. .

L’ouvrage dont nous allons parler aujourd’hui n’est pas le premier qu’elle publie. Avant la Fin de l’impunité, Isabelle Rome a en effet écrit Vous êtes naïve, Madame la juge en 2012, Dans une prison de femmes : une juge en immersion, préfacé par Robert Badinter en 2014, Liberté, égalité, survie, chez Stock en 2020 et L’emprise et les violences au sein du couple chez Dalloz en 2021. Mais c’est pour parler de son action en faveur des femmes et de son dernier ouvrage, La fin de l’impunité, paru chez Stock en février dernier.

Catégories
actualités

Interview d’Elodie Pinel : les philosophEs sont-elles des femmes?

Un essai chez Stock : Moi aussi je pense donc je suis

Elodie Pinel a publié le 14 février un essai sur les femmes philosophes aux éditions Stock. Cet essai vise à nous faire découvrir des penseuses trop souvent oubliées des manuels scolaires et des amphithéâtres et à nous faire penser avec elles, quelque soit notre expérience de la philosophie, quelque soit notre genre, quelque soient nos opinions. Elle nous explique son projet dans notre épisode du 10 mars.

. .

Un parcours autobiographique

Dans son essai, Elodie Pinel revient sur son parcours de philosophe. Elle remarque les femmes qui lui ont manqué : les enseignantes à l’université et les modèles dans les livres. Elle se demande pourquoi elle a cru abandonner la philosophie en ne devenant pas aussitôt professeure de philosophie. Elle témoigne de son combat pour l’égalité. Sa copie d’agrégation qui comportait autant de références à des philosophes femmes qu’à des philosophes hommes ne devrait pas être une exception.

. .

Une enquête sur l’invisibilisation des femmes

Dans son essai, Elodie Pinel met en avant les procédés qui ont conduit à éliminer les femmes philosophes des manuels scolaires et des bancs de l’université. Elle ajoute que certains procédés sont encore à l’œuvre aujourd’hui : « en 2019, sur 84 noms de la liste des auteurs à étudier en classe de terminale, seuls 5 sont féminins. Hannah Arendt, Simone
de Beauvoir, Simone Weil, Elizabeth Anscombe,
Jeanne Hersch ont ainsi les honneurs du Conseil
supérieur du programme
« 

Une (re)définition de la philosophie

Sa recherche de femmes philosophes conduit Elodie Pinel à s’interroger sur la définition de la philosophie. Si l’on en fait un métier lié à l’enseignement et à l’université, dont les femmes ont longtemps été exclues, on contribue à invisibiliser les femmes. Si l’on réduit la contribution des femmes à leur féminisme, on en fait des militantes plus que des penseuses ou des références.

Et si on lisait ces femmes au lieu de disserter sur leur genre?

Pour aller plus loin

Au sujet de « Moi aussi je pense donc je suis. Quand les femmes réinventent la philosophie » d’Élodie Pinel – humanitelles

5 essais pour repenser nos vies | Les Inrocks

Moi aussi je pense donc je suis | Philosophie Magazine

Catégories
actualités

Interview de féministes françaises aux Pays-Bas

. .
Lauraine Meyer
. .
Tiphaine Hubert
. .
Marie-Caroline Haddad

Lauraine Meyer, Tiphaine Hubert et Marie-Caroline Haddad sont françaises et vivent aux Pays-Bas. Féministes, elles ont créé, pour les deux premières, le bookclub féministe Les poilues et, pour la dernière, le média féministe Francine à vélo. 

Nous les avons interviewé toutes les trois pour savoir ce que veut dire être féministe, ici et ailleurs et où en sont les Pays-Bas dans l’égalité hommes-femmes. 

Pour en savoir plus :

⁠Les poilu•e•s (@bookclubfeministelespoilues)⁠

⁠Francine à vélo – Le mag français à la sauce hollandaise

Catégories
actualités

Interview d’Élodie Gaden

Autrices de l’Égypte francophone (1897-1961)

Saviez-vous qu’il y avait en Egypte au début du XXème des autrices qui écrivaient en français ? Nous ne le savions pas avant de rencontrer les travaux d’Élodie Gaden, invitée dans notre podcast. Elle nous fait découvrir des autrices oubliées parmi lesquelles Valentine de Saint-Point, Jehan d’Ivray, Alice Poulleau, Out-el-Kouloub… 

Elodie Gaden, notre invitée

Elodie Gaden est agrégée de Lettres Modernes et titulaire d’un doctorat en littérature de l’Université de Grenoble. Elle a soutenu en 2013 une thèse intitulée “Ecrits littéraires de femmes en Egypte francophone : la femme « nouvelle » de 1897-1961”, publiée chez Classiques Garnier en 2019, et elle a aussi publié Valentine de Saint-Point. Des feux de l’avant-garde à l’appel de l’Orient aux Presses universitaires de Rennes en 2019 également. Elle est actuellement chargée de mission d’inspection en lettres dans l’académie de Versailles. Elle est également formatrice académique sur les questions d’égalité filles/garçons et de lutte contre les violences sexuelles et sexistes.

. .

Pour aller plus loin

Comptes d’Élodie Gaden : 

@ElodieGaden (Twitter)

Ouvrages 

Elodie Gaden, Écrire la « femme nouvelle » en Égypte francophone, 1898-1961, Paris, Classiques-Garnier, 2019

sous la direction d’Élodie Gaden et Paul-André Claudel, Valentine de Saint-Point. Des feux de l’avant-garde à l’appel de l’Orient, Presses universitaires de Rennes, 2018.

Jehan d’Ivray, Au cœur du harem, Presses universitaires de Saint Etienne, 2011.

Alice Poulleau, A Damas sous les bombes, éditions des régionalismes

Isis Copia (May Ziadé), Fleurs de rêve, 1911.

Articles d’Élodie Gaden

« Out-el-Kouloub, romancière égyptienne, musulmane, de langue française : L’altérité culturelle au sein de l’histoire littéraire des femmes françaises », Fabula-LhT, no 7,‎ avril 2010

Valentine de Saint-Point (1875-1953), un article de la revue Nuit blanche, le magazine littéraire, 16 juillet 2012

« « J’irai m’enchanter tristement auprès de mes sœurs islamiques » : Les Derniers Harems (1933) de Myriam Harry », Sociétés & Représentations, vol. 34, no. 2, 2012, pp. 165-173.

Elodie Gaden, « L’esclavage dans les harems d’Égypte, abolition, résistance, survivance. Regards littéraires de Jehan d’Ivray » in Esclavages et littérature. Représentations francophones, Christiane Chaulet Achour (dir.), 2016

Catégories
actualités

Interview de Jennifer Tamas

Actualiser notre lecture des classiques

Dans son essai Au Non des femmes (Seuil, 2023), Jennifer Tamas fait le lien entre des questions actuelles (le consentement, le sexisme…) et la littérature dite classique. Elle n’hésite pas par exemple à comparer le personnage d’Hélène à Marilyn Monroe.

Notre interview de Jennifer Tamas

(Re)lire les classiques

Jennifer Tamas nous invite ainsi à retourner aux textes. En effet, ce qu’on croit savoir sur les classiques nous vient souvent d’un manuel, d’une critique ou d’une autre œuvre. Quelle version du Petit Chaperon Rouge a-t-on lu? A-t-on fini Andromaque de Racine ou se souvient-on surtout des peintures qui la représentent implorant Pyrrhus? Parle-t-on de la Princesse de Clèves ou de la lecture de Philippe Sollers?

Souvent des stéréotypes sexistes nous détournent des héroïnes et de leur bravoure. On voit en Andromaque une veuve noire et en la Princesse de Clèves une femme frigide au lieu de remarquer qu’elles sont des héroïnes du non. Jennifer Tamas nous invite ainsi à libérer les classiques du regard masculin.

Jennifer Tamas invitée de notre podcast

Jennifer Tamas a répondu à nos questions et nous a permis de réaliser un épisode passionnant où se mêlent réflexion sur le rôle de la littérature, interrogation sur sa transmission et mise en évidence de notre vision faussée de l’Ancien Régime.

Merci à Jennifer Tamas et à nos auditeurices !

. .
crédits Bénédicte Roscot

Pour aller plus loin

Comptes de Jennifer Tamas : @JennTamas (Twitter) ; @jenntams (Instagramm)

Site perso de Jennifer Tamas

Ovidie, Princesse de Clèves des temps modernes ? Une ou deux vertus de l’anachronisme

Notre interview de Jennifer Tamas

Catégories
actualités

Rachilde, homme de lettres

. .

Nous recevons aujourd’hui Cécile Chabaud. 

Cécile Chabaud est romancière. Professeure de français, elle a signé d’abord un ouvrage sur le métier d’enseignant Tu fais quoi dans la vie ? Prof ! en 2021. Rachilde : homme de lettres est son deuxième livre ; il a déjà été suivi par un autre roman, Indigne, paru cette année et soutenu haut et fort notamment par Gérard Collard.

C’est pour parler de Rachilde, cette figure trop peu connue et fascinante du XIXe siècle littéraire, que nous l’avons invitée aujourd’hui.

. .