The Feminine Mystique de Betty Friedan pose le problème d’une « mystique de la femme » existant aux Etats-Unis au XXes. selon laquelle la destination féminine serait liée au foyer et uniquement au foyer. L’article « L’éloge de la ménagère dans le discours des ouvriers français du XIXe s » de Michèle Perrot cherche à définir la vision de la femme portée par le milieu ouvrier, et tend à montrer que, dans les mouvements ouvriers et les syndicats (pris en bloc), la femme est souvent présentée comme ayant pour destination, là aussi, l’occupation du foyer et son introduction dans le secteur ouvrier est vu comme une intrusion et un danger, tant pour le salaire et les conditions de travail des ouvriers, pour la conservation de la famille que pour sa propre santé et son propre bien-être.
A ces analyses du discours sur la femme sont à chaque fois confrontés les faits. Betty Friedan convoque les témoignages de femmes pour montrer que suivre ce modèle idéal entraîne un profond ennui et une perte d’identité ; Michèle Perrot confronte au discours alarmiste sur les femmes au travail délaissant le foyer la réalité des chiffres : seules 38% des femmes occupent un travail à temps plein en 1900 et ,en 1906, sur cent femmes, peu occupent un travail ouvrier (25%), la plupart étant domestiques (17% ; celles-ci sont généralement célibataires) ou effectuant un travail textile à domicile (36%).
Dans les deux cas, la confrontation des discours et des faits révèle un décalage : l’idéal brandi aux Etats Unis au XXe s. est factice, la menace redoutée par certains discours ouvriers au XIXe s. est exagérée. D’où ma question : y a-t-il toujours eu une telle différence entre le discours sur les femmes, excessif, et la réalité de leur condition ?