Je sais que cela peut paraître étonnant, mais un passage d’Agnes m’a fait comprendre en quoi Frankenstein est un roman qui ne pouvait être écrit que par une femme – alors même que sa dimension philosophique et fantastique peut le faire passer comme plutôt masculin. En effet, lors d’une conversation entre Weston et Agnes, Weston demande à Agnes si elle est un rat de bibliothèque, ce qu ‘elle dément, et il émet ensuite un jugement de valeur sur l’étude comme étant une activité ne devant jamais supplanter les autres. – C’est là un point de vue d’homme d’église, et Agnes y adhère complètement, n’ayant jamais même songé à se perdre totalement dans l’étude, à y voir plus qu’un simple divertissement. Ce passage m’a rappelé que, conventionnellement, l’orgueil pris aux activités intellectuelles était – en tout cas à l’époque – un fait plutôt masculin, les activités intellectuelles et artistiques des femmes étant reléguées à la simple culture d’arts d’agrément (pour séduire un mari, cf Jane Austen sur la femme accomplie ; c’est d’ailleurs à une telle idée que s’oppose Aurora dans Aurora Leigh). Ce qui m’a, par là même, amené à penser que seule une femme, à l’époque, pouvait mesurer le danger de se perdre dans une activité intellectuelle et à y opposer d’autres valeurs – parce que, de fait, on l’avait élevé dans une autre conception de ces activités.
Mais ce n’est là qu’une hypothèse ouverte à discussion.
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