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[club] Karen Joy Fowlet – The Jane Austen Book Club : Prochainement au cinéma

The Jane Austen Book club vient d’être adapté au cinéma. Il est en post-production. Robin Swicord est le réalisateur. Maria Bello interprètera Jocelyn.

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[club] Karen Joy Fowlet – The Jane Austen Book Club : Le problème des happy ends

Ce qui m’a dérangé dans The Jane Austen Book Club, c’est que les « happy end » s’enchaînent les unes après les autres dans l’épilogue et semblent tomber de nulle part. La leçon tirée des romans de Jane Austen, c’est l’exaltation du couple entendu comme seule façon de se réaliser, d’atteindre une forme de complétude. La devise tirée de toute l’oeuvre d’Austen porte sur cette vision « gentille » des relations sentimentales : « The mere habit of learning to love is the thing » – devise qui discrédite d’emblée tout discours sur la chose, toute théorisation et toute critique (donc toute prise de recul). La seule manière de régler ses problèmes sentimentaux consiste dès lors à fusionner avec une fiction pour en ressusciter la fin heureuse – recette plus magique que pragmatique, et assez peu convaincante, au final. Recette passive et non active, qui plus est.
L’un des personnages du roman (je ne sais plus lequel) se demande à un moment s’il est possible à un personnage de fiction de vivre une fin heureuse sans qu’il s’en aperçoive. Cela me semble dénote d’une vision extrême et trop fermée de la fin heureuse, à savoir d’une apogée finale et explosive de joie débordante (qui se penserait presque sur le mode de l’orgasme…). La fin heureuse est la fin heureuse pour le roman, qui l’achève convenablement, qui en dit la vérité, qui respecte les exigences de départ, qui offre la solution appropriée au problème posé en ouverture. Le « happy end » au sens où l’entend le personnage qui pose cette question est en fait une mesure de rhétorique, une garantie d’efficacité de la narration : pour être diverti et consolé, le spectateur a besoin de s’identifier puis de trouver, dans le dénouement heureux de la fiction, une délivrance cathartique de ses prpres problèmes. Mas cela n’a rien à voir avec la cohérence interne à un récit : il est cohérent que Madame Bovary se finisse sur le suicide d’Emma. Ce n’est pas un « happy end », mais c’est la fin qu’il faut, la seule véritable. C’est une fin heureuse au roman qu’est Madame Bovary.
L’association systématique du happy end avec la rencontre amoureuse me semble elle aussi décevante (une relation ne se borne pas à ses débuts, qui ne sont qu’une promesse dont on ignore encore le contenu exact). S’en tenir à une rencontre amoureuse comme « happy end », c’est encore une fois fuir les exigences de la réalité pour construire une fiction rassurante, qui élude ce qui fait les difficultés (et l’intérêt) des relations humaines.
Au final, je suis donc contre le recours systématique aux « happy end »…

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[club] Karen Joy Fowlet – The Jane Austen Book Club : Qu’est-ce que parler d’un livre?

Ce que révèle The Jane Austen Book Club, c’est d’abord l’irréductibilité des points de vue de lecteurs différents sur une même oeuvre. La construction du roman, par chapitre et lecteur, se veut le reflet de ce relativisme : à chacun son livre préféré, à chacun sa Jane Austen, à chacun sa manière de comprendre ses romans. Le fait que les intrigues des romans de Jane Austen trouvent un écho dans les vies des lecteurs est aussi une façon de relier un livre et les différentes manières de le vivre, donnant par là un indice quant à la question de savoir pourquoi tel lecteur préfère tel livre. La réponse est : parce qu’il s’y retrouve. La motivation fondamentale de la lecture serait donc quasi narcissique, puisqu’il s’agirait de se refléter dans le texte, d’y mirer une image sublimée et plus parfaite de soi. Dès lors, la réduction de l’intérêt à l’attention égocentrique portée à soi-même dessine une conception de la lecture comme nécessairement relative. Il devient impossible de s’entendre sur le sens d’un ouvrage, puisque son sens se réduit à celui que notre vie (ou plutôt : les événements que nous subissons et qui constituent notre vie) lui donne.
Cette manière de concevoir la lecture a du vrai : les textes d’Alberto Manguel, comme le Journal d’un lecteur, où il décrit, à chaque chapitre, quelles interactions telle lecture a pu avoir avec sa vie, peuvent sembler aller dans ce sens. En réalité, ce qui est faux c’est de croire que seule cette manière de lire soit véritable. A côté de cette rencontre d’une vie de lecteur avec un texte, qui suscite l’enthousiasme ou l’indifférence, il y a la lecture scientifique, neutre, qui vise une compréhension du texte à partir du texte même. Il y a aussi la lecture historique, qui cherche, dans le texte, la trace, l’intention, le projet et le travail de l’auteur. Il me semble que c’est en adoptant de telles lectures, en se mettant à l’écoute de ce que le texte a à nous dire qui ne nous intéresse pas en premier chef (car ne nous concerne pas en premier lieu), que l’on se met à même d’être transformé par un texte. Les lecteurs du Jane Austen Book Club cherchent leur reflet dans les romans de Jane Austen, ils l’y trouvent, ils s’y conforment : la boucle est bouclée. Dès lors, leurs vies ne reproduisent que le fil narratif des intrigues d’Austen, elles ne se nourrissent pas en profondeur des leçons que ces textes donnent, des visions de la vie qu’ils proposent. Et ainsi, tout échange constructif qui ait pour objet le livre lu et non les intérêts particuliers de chacun devient en effet impossible.
En conclusion, c’est donc une lecture désintéressée qu’exige la tenue de tout bon bookclub : fort heureusement, je crois que c’est ce à quoi nous nous sommes toutes les deux efforcées depuis le début.

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[club] Karen Joy Fowlet – The Jane Austen Book Club : Le bookclub, une invention anti-féministe?

Le but principal de la mise de ce roman dans notre programme était de mettre en abyme notre propre projet : constituer un club de lecture (même si le terme anglophone « bookclub » est désormais consacré). Ce type de manifestations connaît un succès croissant aux Etats-Unis notamment (Bookclub d’Oprah Winfrey, initiatives de certaines éditeurs anglo-saxons qui ajoutent, en fin de volume, les questions susceptibles d’être soulevées à propos de l’ouvrage) et remet ainsi la lecture au goût du jour.
Or force est de constater, que ce soit dans ces orchestrations télévisées de la lecture ou dans le roman de Fowler lui-même, que ce sont en majorité les femmes qui se constituent en bookclub (Grigg est une exception dans le Jane Austen Book Club, comme le remarque l’une des participantes qui la salue d’une formule plus que contestable : « les hommes parlent, ils ne partagent pas »). Cela est-il seulement du au fait que la majorité des lecteurs, dans toutes les cultures et de tout temps, sont des femmes? Ou y a-t-il là quelque chose de plus significatif?
La remarque d’une des lectrices du Jane Austen Book Club, en révélant une vision caricaturale des hommes, met en avant une mise en opposition des sexes via des particularités qui seraient propres à chacun (les femmes seraient ouvertes au dialogue, les hommes au monologue). Ce qui s’avère, en dernière instance, contraire à l’esprit du vrai féminisme, qui prétend s’élever au-delà des caricatures et revendique une définition ouverte et un traitement égal pour chacun des deux sexes. Si on entend le bookclub comme une manière, pour les femmes, de se réunir entre elles et de cultiver leur goût pour des fictions qui entretiennent leur vision des choses en entérinant le divorce qu’elles croient percevoir entre fiction et réalité, ce genre de manifestation n’est-il pas anti-féministe? N’est-ce pas, en quelque sorte, un geste communautaire voire communautariste?
La réponse à cette question ne me semble pas se trouver dans le roman de Fowler ; ou tout du moins : le fait qu’un homme fasse partie du bookclub décrit semble aller contre cette conception du club de lecture comme vase clos. Il n’en reste pas moins que les réticences soulevées, au départ, face à la venue d’un homme, que le fait que ce soit Jocelyn qui l’ait invité et non lui qui ait spontanément désiré participer, et qu’enfin c’est une écrasante majorité de femmes (5 sur 6) qui constitue ce groupe, soulignent la prédominance féminine du bookclub.
Le danger d’une telle organisation est d’entretenir les femmes dans une sorte de passivité face à la vie, de les inviter à se réfugier dans la rêverie, dans une fiction rassurante et consolatrice mais fausse, car détachée des exigences du réel. Un tel mode de lecture (que beaucoup de lectrices adoptent sans doute face à Jane Austen, même si tel ne fut pas (je l’espère!) notre cas) n’incite pas à ré-inventer le monde mais à s’en retirer. Il entretient les femmes dans une attitude de contemplation et de passivité face au monde ; or l’association de la féminité à la passivité était déjà décriée par Beauvoir dans Le deuxième sexe, et pointée comme une erreur favorisant l’oppression envers les femmes.
Dans le roman au contraire, il semble que la rencontre avec un ouvrage ouvre à ces lectrices un parallèle avec leur vie ; ce parallèle fait en sorte que ces personnages ne sont plus seulement lectrices d’un roman : elles en deviennent l’actrice, l’héroïne principale. On pourrait trouver là une manière de rejoindre l’action, la prise de responsabilité. Or il me semble que, si elles sont les héroïnes de leur vie, leurs vies reprenant à chaque fois la trame d’un des romans d’Austen, elles n’en sont pas les auteurs. Elles restent, finalement, passives, et les happy end finaux tombent comme un cheveu sur la soupe (ce qui n’est pas le cas dans les romans d’Austen).

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[club] Iacub, L’Empire du ventre – La question de la maternité

[photopress:iacub2.jpg,thumb,pp_image]Le livre pose sous l’aspect du droit une question récurrente dans notre réflexion sur le féminisme : la maternité.
La maternité apparaît traditionnellement comme le devenir des petites filles. Elle est même valorisée par certains courants féministes comme une particularité, un don que les hommes n’ont pas. D’où ces questions :
Peut-on être femme sans être mère ? ou plus exactement aujourd’hui Peut-on être une femme pleinement épanouie sans être mère ?
Peut-on être mère sans être femme ?
Qu’est ce qu’être mère ? Suffit-il d’être une femme pour être mère ?
Quels recours pour les femmes stériles ?
Quid des femmes qui ne veulent pas être mère ?
Simone de Beauvoir dénonçait les préjugés autour de la maternité qui opressaient les femmes. La maternité n’est pas fatalement le lot de la femme. « L’amour maternel n’a rien de naturel ». Les mauvaises mères sont des femmes comme les autres. Il y a deux préjugés dans la société. P. 386 : 1) la femme est faite pour être mère, 2) l’enfant est heureux est avec sa mère. Ces préjugés sont responsables du malheur de la mère et des enfants.

Ici Marcela Iacub remarque que, contrairement à ce que l’on pourrait penser, la société et la loi française a évolué vers une définition naturelle de la maternité. Aujourd’hui les femmes ont perdu la liberté de devenir mère sans accoucher (= c’est-à-dire qu’on ne devient pas mère, on l’est en accouchant qu’on le veuille ou non) et l’ouvrage essaye d’expliquer pourquoi. Bien sûr rien n’oblige à être mère, reste l’avortement, mais tout de même c’est assez troublant de faire ce constat. Que la mère est celle qui accouche comme si cela suffisait à faire d’une femme une mère…
C’est d’autant plus troublant que je suis sur ce point de l’avis de Beauvoir. Etre femme est certes la capacité physiologique à être mère (quoique pas toujours), mais cela ne suffit pas pour être mère au sens où on l’entend couramment : s’occuper de l’enfant, l’aimer… Il faut encore le vouloir, être prête, et apprendre…Donc je ne trouve rien de scandaleux à ce qu’une femme accouche et ne veuille pas être la mère de cet enfant, pas plus que je trouve scandaleux qu’une femme qui ne peut pas enfanter souhaite devenir mère et devienne la mère de l’enfant qu’une autre a mis au monde. Par contre je me demande si ce n’est pas scandaleux de prétendre que la seule mère au fond est celle qui a enfanté et de priver ainsi l’enfant d’une vraie mère…

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[club] Iacub, L’Empire du ventre – Féminisme de l’égalité

[photopress:iacub1.jpg,thumb,pp_image]Iacub sous-entend ici une définition du féminisme comme la recherche de l’égalité entre les hommes et les femmes, non pas au nom de la nature mais de la culture (institutions, volonté…). Si elle critique la définition de la maternité par l’accouchement, c’est parce qu’elle instaure une profonde inégalité entre les hommes et les femmes. D’abord, celle-ci semble au privilège des femmes : elles peuvent choisir d’avorter ou non, les hommes subissent ou une non-paternité ou une paternité. Et pourtant la moitié de l’enfant est bien leur œuvre…Mais la supériorité des femmes est en fait une apparence. Les hommes ont plusieurs possibilités pour devenir de véritables pères, mais les femmes n’en ont qu’une : accoucher.

Cette situation en France s’explique par la lutte des femmes pour le droit à l’avortement. Alors les femmes défendues par les féministes des 70 ne sont que celles qui peuvent accoucher ?Marcela Iacub nous invite à une critique de ce mouvement des années 70 (p. 259). Le féminisme pour avancer doit critiquer son histoire.

Dans la perspective de Iacub, le sexe des parents deviendraient indifférents. Il s’agit donc de gommer les différences entre les sexes grâce aux lois en mettant en avant les intentions des individus… Elle rejoint par là la position universaliste de Beauvoir, mais elle y ajoute de la clareté : elle explique comment l’égalité peut être réalisée.

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[club] Iacub, L’Empire du ventre – Prudence préléminaire

[photopress:iacub3.jpg,thumb,pp_image]Marcela IACUB n’aborde que le point de vue du droit, et un peu celui du sociologue. Elle ne prend pas en compte les avis des psychologues. Je pense pourtant que cela complèterait habilement l’ouvrage.
Je pense qu’il faut avoir à l’esprit quand on envisage cet ouvrage, cette absence.

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[club] Virginia Woolf – Flush : Une biographie canine

J’ai beaucoup aimé ce livre que j’ai trouvé facile à lire, souvent drôle et toujours juste.
Pourquoi ce livre ? J’ai réfléchi à la question et plusieurs réponses me sont apparues qui me semblent toute plausibles et toutes appartenir aux intentions de Woolf.
1) Parce que les animaux méritent qu’on s’intéresse à aux et qu’on rende hommage à leur présente muette mais si importante pour ceux qui les aiment.
2) Parce que faire la biographie d’un chien permet de se moquer du style des biographes (moi j’ai trouvé très drôle le début sur la généalogie de Flush) et surtout de se moquer de la société (les animaux, les étrangers par leur naïveté, leur ignorance pointent directement les dysfonctionnements. C’est le coup des Indiens de Montaigne…)
3) Parce qu’en choisissant d’entrer dans la vie d’Elizabeth Barrett Browning par les yeux de son chien, Woolf évite « la biographie d’une femme écrivain par une femme écrivain ».
C’est ce dernier point qu’il me semble intéressant de développer… Nous avions déjà soulever la question de la possibilité pour un écrivain de se positionner comme une personne d’un autre sexe… Woolf ici va plus loin elle se positionne comme quelqu’un d’une autre catégorie biologique… Et ça marche… Parce qu’elle sait observer l’animal et parce que de toutes les façons aucun des lecteurs n’a jamais été chien… Il n’y a pas de réelles pour l’écrivain… Surtout pas celle du sexe.

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[club] Virginia Woolf – Trois guinées : Le pouvoir féminin

Je voulais aussi relever le passage où V. Woolf reproduit la lettre où son interlocuteur justifie son refus de lui donner 1 guinée. A un moment, il déclare que les femmes ne peuvent pas siéger dans une assemblée sérieuse (intellectuelle ou politique) parce que son éducation « de femme » (à la coquetterie) la pousserait à distiller autour d’elle une atmosphère de séduction qui ne cadrerait pas avec le but poursuivi par cette assemblée.  » « Mademoiselle » peut évoquer le froufrou des jupons, l’arôme d’un parfum (…). Ce qui charme, apaise dans une demeure privée, peut distraire, exaspérer dans un bureau. »
Ainsi, l’homme en question, qui participe, par sa vision des choses, à encourager cette éducation des femmes à la coquetterie qui les chosifie (elles se transforment en poupées), prend cette éducation comme motif à éloigner les femmes du bureau : c’est un cercle vicieux ! Il pose un parti-pris (les femmes à la maison, les hommes à l’extérieur) en tire les conséquences (les femmes deviennent des poupées) et utilise cette conséquence pour justifier son parti-pris (les poupées n’ont pas leur place dans un bureau). C’est un argumentaire totalement fallacieux!
J’observe en passant que ce pouvoir de séduction qu’auraient infailliblement les femmes leur est compté comme un vice, un désavantage, quelque chose dont on peut leur faire un reproche. En réalité, c’est bien un pouvoir que les femmes peuvent avoir, en l’occurrence, sur les hommes – et c’est justement pour cela qu’on a pu leur faire le reproche, et tenter de le juguler. En reprochant aux femmes de les séduire, en attribuant à ce pouvoir de séduction la source légitime de tous leurs maux (cela va d’Eve tentatrice aux femmes violées desquelles on dit : « elle l’avait bien cherché, elle portait une jupe la nuit »), les hommes concernés ne font qu’avouer leur faiblesse (et leur esprit de tyrannie).

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[club] Virginia Woolf – Trois guinées : Et la sexualité?

D’après son journal, Virginia Woolf comptait écrire un essai sur la sexualité féminine. Or la sexualité me semble absente deTrois guinées…
Simple hypothèse de ma part : la sexualité n’est-elle pas un versant de l’indépendance des femmes que l’argent ne peut pas acheter? Le seul sans doute…