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[club] Poulain de la Barre – L’exception ne fait pas la règle

Les féministes sont parfois tentées d’avancer le destin d’une femme pour prouver la valeur des femmes.

Poulain de la barre ne s’engage pas sur cette voie car il sait qu’on lui répondra que l’exception confirme la règle. p. 351 : il veut rester dans le général pas dans le particulier.

L’hypothèse soeur de Shakespeare de Woolf aurait donc plus de poids que Woolf elle-même…

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[club] Poulain de la Barre – L’anonymat involontaire

Je souhaitais relever le peu d’écho que le traité de Poulain eut à son époque. Peu d’écho auquel il était le dernier à s’attendre ! Poulain souhaitait pouvoir répondre à des contradicteurs et s’attendait à susciter une virulente polémique… Et rien ! Il dut écrire lui-même les objections qu’il aurait souhaité combattre, comme s’il se livrait au vieil exercice médiéval de la disputatio (examen des arguments « pour » puis des arguments « contre », ou inversement).

Il est vrai que les traités féministes en tant que tel n’étaient pas nombreux à l’époque. Mais nous avons vu, à travers nos lectures, que beaucoup d’oeuvres, romanesques ou théâtrales, traitaient de la question des femmes. Les Précieuses, critiquées de manière presque unanime, même par Poulain, qui fait d’elles un portrait satirique (p. 164). Poulain épingle leur orgueil et leur vanité, leur goût pour l’artifice et leur dédain pour le mari. Mais il occulte qu’à travers le mari, c’est l’institution du mariage que les Précieuses méprisent, et méprisent en acte, pas seulement en théorie!

Cela rejoint un des posts précédents : et si les oeuvres de fiction et les comportements quotidiens de certains n’avaient pas, en l’occurrence, fait davantage pour la cause des femmes qu’un traité de philosophie ?

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[club] Poulain de la Barre – Penser et/ou agir

Poulain de la Barre pense l’égalité des sexes et fait un effort intellectuel pour la démontrer. Plus exactement, il montre que l’inégalité des sexes est un préjugé qui repose en grande partie sur la force de la coutume.

Mais veut-il pour autant changer la coutume ?

Ainsi lorsqu’il réfute les théologiens qui trouvent dans les propos de Paul de quoi justifier l’inégalité des sexes, il remarque qu’il dit seulement que les femmes doivent rester où elles sont, que Paul approuve la coutume sans l’appuyer sur la nature.

Est-ce aussi la position de Poulain ? Veut-il seulement démontrer l’égalité des sexes pour la forme sans œuvrer pour l’émancipation des femmes ?

Je trouve qu’il est difficile de répondre. Certes il met en place un programme d’éducation des femmes, mais il prône aussi la discrétion du philosophe. p.286 « Il faut étudier pour soi seul et comme si l’on était seul ; penser le mieux que l’on peut, puisque l’on ne pense pas comme l’on veut ; et demeurant parmi les hommes, par que l’on ne s’en peut séparer absolument, ne pas paraître trop d’esprit, ne pas exercer sa raison sur toutes choses en leur présence, puisqu’ils y trouvent à redire »

Il faut bien sûr considérer l’époque de Poulain. Il se peut que sa position soit stratégique. En effet, il risquait la censure s’il avait eu des visées révolutionnaires. De même il doit rester très prudent en critiquant la Bible.

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[club] Poulain de la Barre – Cartésianisme et féminisme

Une des stratégies de Poulain de la Barre est de montrer que les différences entre les hommes et les femmes se résument à des différences physiques, qu’ils ont le même esprit dans des corps différents. « Il est aisé de remarquer que la différence des sexes ne regarde que le corps » p.95

Cela tombe bien dans une philosophie cartésienne, dualiste et dans laquelle l’esprit prime sur le corps. Je me demande si la démonstration de Poulain reste valable dans un autre contexte.

Doit-on être cartésien pour être féministe ?

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[club] Poulain de la Barre – Obstacles au féminisme

J’ai trouvé que De l’égalité des sexes mettait bien en évidence les obstacles au féminisme : le poids de la coutume, la force des arguments théologiques, le fait que peu de femmes soient pour l’égalité. Il faut donc s’efforcer de lever ces obstacles et c’est ce que Poulain de la Barre fait dans ses écrits.

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[club] E. Dorlin – Réformer le langage

Elsa Dorlin fait un parallèle entre préciosité et paritarisme lorsqu’elle observe que, si les Précieuses ont réinventé la langue française, l’instauration de la parité en politique s’est accompagné d’une féminisation des titres et des professions (p. 127-128).  On s’est abondamment moqué des périphrases et des hyperboles des Précieuses : un fauteuil devenait, chez Molière, une « commodité de la conversation » et les « plus… du monde » abondent chez elles.  Et on peut relever que la féminisation des noms reste encore sous-utilisée… Combien disent « Madame la Ministre » (c’est l’exemple pris par Elsa Dorlin)? La professeure ? L’écrivaine ? La défenseure ? Et d’ailleurs dit-on défenseure ou défenseuse ? Successeur ou successeuse ? L’auteure, l’autrice, ou que sais-je encore ? Et pourquoi, lorsque nous citons une femme, nous sentons-nous presque obligés de faire précéder son nom de son prénom, comme s’il pouvait y avoir confusion avec un homme plus célèbre du même patronyme (réflexe que j’ai eu moi-même ici)?

Le langage enregistre les mentalités ; si l’on veut changer ces dernières, peut-être faut-il commencer par modifier le premier.

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[club] E. Dorlin – Mise en abyme de notre propre démarche

Je relève le programme que dresse Elsa Dorlin en conclusion de son ouvrage. Relevant l’oubli qui a marqué les 4 auteurs étudiés, elle indique la chose suivante : « Au fond, si ces auteurs ont été oubliés, on en déduit naturellement que c’est parce que ce sont des auteurs mineurs, des personnages secondaires, alors que ce jugement porte sur leur objet de pensée. (…) Le sujet n’est pas noble, les auteurs sont donc considérés comme médiocre et on n’a pas fait grand cas de leurs oeuvre, ne serait-ce que dans les rayonnages des bibliothèques. »(p. 146). Et plus loin : « Ce processus de méconnaissance révèle une véritable violence idéelle, impalpable, faite aux femmes, qui réside précisément dans cette confiscation insidieuse de leur histoire et de leur héritage, parce que tout est fait pour qu’elles ignorent en être les légatrices universelles ».

Je crois qu’en lisant ces auteurs et en débattant de nos lectures, nous contribuons, à notre manière, à nous ré-approprier cette histoire…

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[club] E. Dorlin – L’argument des arguments

Je trouve que le féminisme logique résume très bien nombres de nos discussions précédentes où nous nous sommes trouvés face à des partisans de l’inégalité des sexes et de la supériorité masculine. Leurs arguments nous sont apparus faux, voir ridicules… On ne peut pas prouver l’inégalité des sexes. Donc l’égalité des sexes est vraie.  CQFD.

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[club] E. Dorlin – L’instrumentalisation du débat féministe

Comme l’indique Elsa Dorlin, les démonstrations menées par les philosophes féministes du 17e s pour démonter la thèse de l’inégalité sexuelle et faire éclater, par la logique, l’évidence de l’égalité des sexes, se heurte à un problème de taille. En effet, si la démonstration est logique et rationnelle, elle ne peut pas convaincre ceux qui ont intérêt à celle qu’elle reste méconnue.

Ainsi, Elsa Dorlin indique que « l’inégalité sexuelle » a été utilisée comme un « instrument d’organisation sociale » (p. 88) : les hommes sont juges et partis dans la Querelle des femmes car ils sont les « maîtres » des femmes (le terme est de Gabrielle Suchon, p. 93). Ils n’ont pas intérêt à reconnaître les femmes comme leurs égales ; ce serait, pour eux, perdre de leur pouvoir. Elsa Dorlin ajoute : « Se donnant pour fin la domination, la rationalité renonce à établir ou, du moins, à rechercher la vérité au profit du vraisemblable » (p. 95).

Ce qui compte, ce n’est donc pas ce qui est vrai, mais ce qu’il nous arrange de prendre pour vrai. La raison, ce serait, ici, la logique au service de l’intérêt.

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[club] E. Dorlin – Logique de l’éducation féminine au 17e s

Elsa Dorlin pointe un des problèmes de l’éducation féminine au XVIIe siècle (pour les classes favorisées, bien sûr ; les autres n’avaient pas accès à l’éducation) : l’éducation féminine a alors pour but d' »empêcher l’autonomie » de la femme (p. 53). Il ne s’agit pas de lui faire développer ses capacités mais d’en entraver le développement, pour en faire une « éternelle mineure ». Par là, la « culture » créé de toute pièce l’état féminin que la misogynie proclame comme naturelle, et qui n’est que fabriquée.

Je  relève le même genre de processus lorsqu’Elsa Dorlin évoque le silence qui a accompagné les oeuvres des 4 philosophes qu’elle étudie, Gabrielle Suchon, Marie de Gournay, François Poullain de la Barre et Ana Maria Van Schurman (p. 146-148) : en ne donnant pas de publicité à ses ouvrages, en faisant comme s’ils n’existaient pas, les philosophes et savants du 17e ont, en quelque sorte, réduit ces ouvrages à néant. Là encore, les misogynes parviennent à nier une réalité et à imposer la seule qu’ils tolèrent : il n’y a pas de philosophie féministe parce qu’il ne doit pas y en avoir.

Dans le premier cas, nous sommes en présence d’une mutilation de l’identité d’individus ; dans le second, d’une falsification de l’histoire. Et, comme on le voit grâce à cet ouvrage, les procédés qui arrivent à ces résultats ne sont pas directs, frontaux, mais pervers et insidieux, presque invisibles – et, pour cette raison, d’autant plus violents.