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[club] Freud – Sortir de l’Oedipe ou comment tuer le père

Des psychanalystes après Freud, comme Liliane Fainsilber dans La place des femmes dans la psychanalyse ont montré qu’il avait manqué la sortie de l’Oedipe pour les filles, qu’elles devaient elles aussi tuer le père. Reste à savoir comment.

Si c’est en trouvant un mari qui se substitue au père ou en ayant un enfant, on ne sort pas de l’éternelle minorité.

Je pense que cette question : Comment les femmes peuvent-elles tuer le père? est un bon fil conducteur pour notre cycle « Femmes et psychanalyse ». De plus j’aimerais aussi poser cette question : la nécessité de tuer le père signifie-t-elle la fin du patriarcat?

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[club] Freud – L’oedipe féminin ou l’éternelle minorité des femmes

Freud montre que lorsque le passage entre la phase préœdipienne (attachement à la mère/ clitoris) et la phase oedipienne (attachement au père/ vagin) se passe mal, il en résulte des névroses. Des régressions à la pase péoedipienne sont ainsi très fréquentes.

Par contre Freud ne théorise pas vraiment la sortie de l’Oedipe pour les femmes. Les femmes ne tuent jamais le père… (Quand on pense à la relation entre Freud et sa fille Anna, en effet…). Dans la cinquième conférence, il évoque une sortie tardive de l’Oedipe (avec le mariage et la maternité…) et une formation imparfaite du surmoi qui explique que la femme ne peut parvenir ni à l’indépendance ni à la puissance comme l’homme.

Avec ces éléments, il est facile d’utiliser la psychanalyse contre l’émancipation des femmes et contre l’égalité des sexes.

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[club] Freud – De la mère au mari

Je relève cette idée que Freud développe dans la conférence sur la féminité et la texte sur la sexualité féminine : si la femme développe une hostilité envers son mari, c’est en écho avec celle qu’elle avait développée, enfant, envers sa mère…

Si seulement les choses étaient aussi simples ! Nous avons pourtant vu, à travers de nombreuses fictions, que les récriminations des femmes envers des maris (rarement épousés par choix) n’avaient pas grand chose à voir avec celles adressées par des petites filles à leur mère… On reproche rarement à sa mère de coucher avec d’autres femmes, de dépenser tout l’argent du ménage, d’être violente… Freud me semble occulter un peu vite la (dure) réalité de la condition féminine conjugale de son temps.

La règle qui veut que les seconds mariages soient plus heureux, pour les femmes, que les premiers, me semble aussi bien farfelue… Sauf à comprendre que ces seconds mariages ont été contractés par amour et pas, comme les premiers, par obligation familiale.

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[club] Freud – La sexualité féminine

Dans le texte « Sur la sexualité féminine », Freud établit comme un fait incontestable que la petite fille a renoncé au clitoris pour se tourner vers le vagin… Si cela correspond sans doute à des schémas mentaux ancestraux, dont on peut trouver la trace dans la pratique de l’excision comme rite de passage à l’âge adulte, cela ne répond à aucune vérité éprouvée. Le plaisir féminin demeure plus fortement attaché au clitoris qu’au vagin et ceci, quel que soit l’âge de la femme. Nous sommes aujourd’hui abreuvés d’études allant dans ce sens… Et il aurait suffi que Freud écoute les femmes pour le découvrir, ou que la société de son temps les laisse s’écouter et leur permette de se faire entendre.

Cela aurait peut-être révolutionné la psychanalyse…

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[club] Freud – Portrait de femme

Selon Freud, la longue station de la petite fille dans la phase oedipienne cause une absence d’indépendance et de force du surmoi (p. 173). Comment le comprendre ? Comme une absence d’indépendance et de force de la femme ? Le surmoi étant l’instance psychique formulant les interdits, notamment moraux, il est surprenant de lire chez Freud qu’il est moins fort chez les femmes que chez les hommes : les hystériques étaient des femmes muselées par leur surmoi et Freud écrit lui-même, plus loin, que les femmes trentenaires sont, en thérapie, « rigides » – ce qui semble dénoter une certaine force de leur surmoi…

Autre trait du portrait que Freud dresse des femmes : un plus haut degré de narcissisme (être aimée serait plus important qu’aimer), la fréquence du sentiment de jalousie et de rivalité, la pudeur… Liste devant laquelle on peut s’interroger : de quel type de femmes s’agit-il ici ? De la jeune femme bourgeoise viennoise du XIXe siècle ? Importe-t-il vraiment plus pour toutes les femmes d’être aimée par son enfant que de l’aimer, par exemple ? On peut en douter. La rivalité n’est-elle pas le ressort de bien des entreprises masculines ? Il n’y a qu’à voir les fictions, depuis le roman du Moyen Age jusqu’aux superproductions américaines actuelles. Quant à la pudeur, ne sait-on pas depuis Montaigne et son essai « Des cannibales », depuis la découverte des Amériques et des îles de Polynésie, qu’elle est une donnée culturelle, indistinctement distribuée entre hommes et femmes ?

Le clou de ce portrait des femmes réside sans doute dans cette affirmation audacieuse : « On estime que les femmes ont apporté peu de contributions aux découvertes et aux inventions de l’histoire de la culture »… Freud écrit pourtant au XIXe siècle : il aurait pu lire beaucoup des auteurs dont ce bookclub traite. Il ajoute : « peut-être ont-elles quand même inventé une technique, celle du tressage et du tissage ».

« Quand même » ; « peut-être »… On pouvait attendre de l’inventeur de la psychanalyse une meilleure connaissance de l’histoire des techniques : les femmes ont inventé l’agriculture ; ce sont souvent elles qui guérissent dans les villages, dès le Moyen Âge ; elles inventent également la gastronomie.

Mais ce ne sont sans doute pas des techniques assez nobles pour être relevées ?

Le point de vue de Freud sur les femmes me semble donc, en définitive, sérieusement entaché par bien des préjugés et des jugements hâtifs – et c’est bien dommage.

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[club] Freud – Les limites de l’interprétation

Dans la conférence sur la féminité, Freud semble parfois prendre pour argent comptant des généralités sur les femmes et essayer ensuite d’en rendre compte par l’élaboration d’une interprétation psychanalytique.

L’exercice est intéressant ; mais nombre de ces généralités pourraient être passées en revues et invalidées aujourd’hui. Il y prend garde lui-même au début de la conférence : il ne faut pas associer féminité et passivité… mais on peut dire, selon lui, que la féminité consiste dans le fait de préférer des buts passifs (p 155). Freud met cela en parallèle avec la « répression de l’agressivité » de la femme… Absence d’agressivité que la théorie du care mettrait plutôt en avant comme une caractéristique à part entière et non comme la destruction d’une pulsion.

Ce problème, récurrent dans cette conférence, trouve son expression la plus aboutie dans la fameuse « envie de pénis » : toute la psychologie féminine se fixerait sur cette absence, ce manque. Mais pourquoi la petite fille devrait-elle se sentir dépossédée de quelque chose ? Parce que ses organes sexuels sont cachés, elle doit envier le petit garçon chez qui ils sont visibles ? La dissimulation peut être perçue comme un avantage ; de plus, que des organes soient cachés ne signifie pas qu’ils n’existent pas, et il me semble que les petites filles peuvent tout à fait en avoir conscience… Quand les petits garçons, eux, auront plus de mal à le concevoir !

Et si l’on devait substituer à l’envie du pénis chez la petite fille le fantasme de l’envie du pénis pour le psychanalyste ?

Enfin, toujours à propos de cette « envie de pénis », je relève que Freud lui attribue le renoncement à l’activité masturbatoire clitoridienne de la petite fille (p. 169) quand il indique, quelques pages auparavant, que ce renoncement est dû à l’interdit formulé par la mère (p. 165). Alors, le complexe féminin, à qui la faute ?

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[club] Freud – L’énigme féminine

La conférence sur la féminité commence par un lieu commun qui prête aujourd’hui à sourire : la féminité est une énigme.

Enigme pour qui ? Freud précise qu’elle en est une pour son public, constitué d’hommes…

Enigme en quoi ? Freud développe : énigme de la différence sexuelle, dont la biologie ne rend compte qu’anatomiquement.

Mais alors, pourquoi dire que c’est la féminité qui constitue une énigme, plus que la virilité ?

Il me semble qu’ici Freud formule la question des comportements sexués, traités aujourd’hui par les théories du genre : dans quoi s’enracinent les comportements que l’on dit féminins, ceux que l’on dit masculins ?

Mais il me sembler qu’il manque une question à Freud : pourquoi associe-t-on tel comportement à la féminité ? Tel autre à la virilité ? Peut-on remettre en cause cette partition des émotions et des attitudes ?

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[club] La Belle dame sans mercy – La femme fatale

Dans La Belle dame sans mercy apparaît le type de la femme fatale, qui refuse celui qui l’aime et le fait souffrir sans compatir à sa douleur ou chercher à l’apaiser. D’autres femmes s’inscrivent dans ce type, mais plutôt au XIXe siècle : ainsi du personnage féminin dans La femme et le pantin de Pierre Louÿs, de Carmen dans la nouvelle de Mérimée, de Nana dans le roman de Zola…

La différence entre la Belle dame et les héroïnes du XIXe siècle est que ces dernières séduisent par leur beauté et se jouent des sentiments masculins pour en tirer bénéfice. La Belle dame sans mercy, au contraire, ne demande qu’à être tranquille. Mais de ses répliques n’est pas toujours absente une certaine ambiguïté : « Les yeux sont faits pour regarder »…

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[club] La belle dame sans mercy – Emancipation féminine

La Belle Dame sans mercy est un débat poétique entre un amoureux et celle qu’il aime qui parodie le discours courtois. Ce débat  est enchâssé dans l’histoire du narrateur, témoin de ce dialogue. L’amoureux est éconduit : il présente tous les arguments habituels de l’amour courtois (mal d’amour, don du coeur, risque de mort et de martyre d’amour, demande de pitié de la part de la dame) mais, à la différence des dames qui récompensent les épreuves subies par leur ami (on appelle cette récompense le guerredon), cette « belle dame » est sans merci (donc sans pitié) et réfutent les arguments présentés.

Ce texte a eu beaucoup de succès et a suscité des continuations et des réponses : il n’a pas laissé insensible. Son caractère fictionnel invitait à la réplique, comme dans les cours d’amour ou les « puy », sociétés où les intervenants proposaient des textes sur un thème et/ou avec une forme donnée. Mais, comme l’indique l’éditeur en introduction, le texte de Chartier n’est pas le seul à présenter une telle dame et une telle réponse à l’amour courtois. Pourquoi un tel succès ?

Peut-être, et c’est en cela que le texte s’avère féministe, parce que la dame y manie le bon sens avec une telle évidence qu’on ne peut que se rendre à ses arguments et qu’elle déjoue les pièges et les artifices du discours courtois en manifestant qu’il est à l’avantage de l’homme et non de la femme, contrairement à ce qui en est généralement présenté. En effet, on dit que la dame est, dans l’amour courtois, celle qui domine et qui fait subir des épreuves à l’ami : en réalité, elle n’est pas libre de refuser l’ami qui souffre pour elle, selon la logique courtoise, sous peine d’être accusée d’être impitoyable, méchante. La Belle dame sans mercy remet les choses à leur place : le discours courtois est un mensonge, une imposture, destinés à prendre les femmes au piège en les culpabilisant. Elle rend cette vérité évidente et c’est en cela qu’elle est, selon moi, un héraut de la cause féminine.

Par ailleurs, par son bon sens et ses arguments sans faille ni détour, la Belle dame anticipe le style des réponses de Jeanne d’Arc à son procès, en 1440 : saisissantes de vérité, de logique et d’évidence.

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[club] Quinze joies du mariage – Féministe ou misogyne ?

Les Quinze joies présentent des femmes vénales, manipulatrices, infidèles et fainéantes. Leurs maris au contraire sont droits, honnêtes et travailleurs et se font duper en permanence.

D’après la préface, la critique des femmes n’est que le premier degré de lecture. Monique Santucci citée p.823 :  » (…) derrière un antiféminisme de façade, l’auteur s’en prend à la société; l’antiféminisme est un paravent qui masque ses audaces. » Dans ce cas, notre précédente lecture, La farce du cuvier, serait aussi un écrit féministe déguisé.

Je ne suis pas convaincue.

Je ne sais pas ce que l’auteur au Moyen Age pensait, mais aujourd’hui je doute que l’effet satirique passe…

Certes l’auteur fournit une critique du mariage, mais je pense que ce type de texte contribue à créer des stéréotypes négatifs pour les femmes… La critique à mon avis est trop subtile… Je ne sais pas…. Le problème, je pense, c’est que le texte ne charge que les femmes… Ce serait différent si le mari avait parfois le mauvais rôle, on pourrait dire que l’auteur veut se moquer de l’institution du mariage…

Quand le texte présente une femme fainéante qui ne fait rien à la maison, discute avec ses copines et s’amuse avec son amant, obligeant le mari à s’occuper des enfants et de la maison, il peut nous apparaître satirique dans la mesure où nous savons que c’est irréaliste… Mais combien de gens le savent ? J’ai l’impression, encore une fois aujourd’hui, que l’idée la plus répandue c’est qu’il est facile d’être mère au foyer, que ces femmes ont peu à faire… Dans ce cas, un texte comme le Cuvier ou les Quinze joies renforcent le préjugé.