Else n’a pas d’enfant dans La nuit du carrefour ; Betty, en revanche, en a deux. La manière dont elle décrit son absence d’amour maternel est intéressante au regard de nos lectures de L’amour en plus d’E. Badinter : « Vous croyez à l’amour maternel ? (…) J’oubliais que vous n’avez pas d’enfant. Vous ne pouvez donc pas savoir. Je parle de l’amour maternel comme dans les livres, comme en parle à l’école, comme dans les chansons. Quand je me suis mariée, je pensais bien qu’nu jour j’aurais des enfants et cette idée m’était agréable. Cela faisait partie d’un tout : la famille, le foyer, les vacances au bord de la mer. Puis lorsqu’on m’a annoncé que j’étais enceinte, j’ai été déroutée que cela vienne si vite, alors que j’avais à peine cessé d’être une petite fille. (…) Je ne me cherche pas d’excuses. J’essaie de comprendre. (…) Je suis peut-être un monstre. Dans ce cas, je jurerais que c’est le cas de milliers et de milliers de femmes. »
Son récit de sa grossesse et de son accouchement, puis de la manière dont la bonne lui prend son enfant en s’en occupant d’autorité à sa place, peuvent tendre à montrer que l’amour maternel est quelque chose qui se construit et n’a rien d’inné.
2 réponses sur « [club] Simenon – Maternités »
Betty ne s’est pas sentie mère, mais on ne l’a pas aidée.
Dès la grossesse, elle dit qu’elle ne comptait plus. C’est un thème que l’on a déjà rencontré, je dirai même que l’on a presque toujours rencontré : la dépossession de soi. Betty quand elle devient mère n’est plus Betty mais la mère des enfants de Guy et cela lui est insupportable.
Le thème de la dépossession de soi rappelle en effet au moins Le deuxième sexe de Beauvoir ; la scène surprise entre la jeune Thérèse et l’oncle de Betty va aussi dans ce sens : Thérèse est un objet, Betty est fascinée par elle. Else, elle aussi, est réduite à l’état de chose, je dirai même de meuble, puisqu’elle ests enfermée dans la maison…